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Avion établi sur l’ILS mais… il va vers le terrain !

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Parmi tous les instruments qu’il y a dans un avion, l’ILS jouit d’une position particulière. Comme il est régulièrement l’outil principal lors d’approches sans visibilité, il est particulièrement critique. Pourtant l’OACI et la FAA lancent régulièrement des alertes concernant un usage non conforme de cet instrument. A de nombreuses occasions, des Boeing 767, 777 et des Airbus se sont retrouvés établis sur un faux glide qui se termine quelque part avant la piste. Ce glide se trouve sous la pente réelle d’approche et peut donc causer un accident alors que les pilotes se croient correctement établis sur l’ILS. Tous les avions de ligne, des plus anciens aux plus modernes, sont concernés par ce problème.

Incident chez Air New Zeland
Ca se passe dans la nuit du 29 juin 2000. Un 767 arrive sur l’aéroport d’Apia, capitale de l’archipel de Samoa. Durant la préparation du vol, les pilotes avaient lu les Notams de leur terrain de destination qui affichaient l’ILS comme UNMONITORED STATUS.

 

Notam ILS UNMONITORED STATUS
UNMONITORED STATUS : Signifie que la tour de contrôle n’a pas
de signal en cas de problème avec l’ILS.
 

 

Lors de l’approche, les pilotes font un briefing complet pour un approche ILS et aussi une VOR DME au cas où l’ILS ne fonctionnerait pas. Néanmoins, ils ont une bonne surprise. Dès qu’ils se mettent sur l’axe d’approche, l’ILS est capté et l’avion se trouve immédiatement sur le glide.

 

pilote automatique
Les 3 pilotes automatiques engagés sur un faux glide
sans problème.
 

 

Problème d’énergie
Dès le début de la descente, l’avion commence à accélérer. Le commandant de bord ne comprend pas ce comportement anormal. Pourtant, les 3 pilotes automatiques sont engagés et l’indicateur ILS est bien centré que ce soit au niveau glide ou loc. La balise émet un identifiant Morse correct. Le train d’atterrissage est sorti plutôt que d’habitude et les spoilers déployés pour maintenir la vitesse à une valeur raisonnable.

Des doutes…
A 1000 pieds de hauteurs, les doutes deviennent de plus en plus pressants. L’avion se comporte anormalement et malgré la baisse de la densité nuageuse, la piste n’est pas encore en vue. Seules quelques lumières diffuses apparaissent au lointain. Le troisième pilote fait un contrôle croisé entre la hauteur de l’avion et la distance DME. Le résultat ne correspond pas à la carte d’approche.

Le copilote se penche de coté et regarde par son hublot. Il voit les lumières d’un village que l’avion survole à très faible hauteur. L’altimètre indique 400 pieds.

Sans plus attendre, les pilotes décident de faire une remise des gaz. Rappelons, que lors de la majorité des CFIT, au moins un des membres d’équipage exprime des incertitudes sur la position de l’avion ou sur sa trajectoire mais ce n’est pas suivi d’une réaction énergique.

Une fois que l’avion remonte vers une altitude sûre, les pilotes traversent une période de doute encore plus pénible. Ils se sentent trahis par leur avions et ne savent plus à quels instruments il faut faire confiance. En effet, il n’est pas facile de diagnostiquer à coup sûr une panne d’un instrument de nuit et en conditions de vol IMC.

Après de nombreux contrôles et éliminations mais aussi discussions avec le contrôleur aérien, les pilotes comprennent que c’est le faisceau glide tel qu’émis par l’antenne située à l’aéroport qui a un souci.

Ils reviennent atterrir en utilisant seulement le LOC et en faisant extrêmement attention à leur trajectoire.

Que s’est-il passé ?
Il faut revenir au fonctionnement de l’antenne du glide pour comprendre cet incident. Le glide émet une onde porteuse qui est un mélange à part égale d’une onde modulée à 150 Hz et d’une autre modulée à 90 Hz. A cela, viennent s’ajouter deux autre ondes :
– Une onde qui forme le lobe supérieur modulée à 90 Hz
– Une onde qui forme le lobe inférieur modulée à 150 Hz

Quand l’avion se trouve au dessus du plan de descente, le récepteur ILS capte un mélange d’ondes à dominante 90 Hz. Au contraire, quand l’avion est en dessous du plan de descente, c’est le 150 Hz qui est dominant.

Sur le plan de descente lui-même, la force des deux signaux est dominante. Ainsi, un récepteur ILS dès qu’il capte un mélange à part égale de 90 et de 150 Hz, il va afficher que l’avion est dans le plan de descente.

 

Fonctionnement ILS
ILS Normal avec distribution correcte des champs 150 et 90 Hz.
 

 

Fonctionnement ILS
Comme seule la porteuse est émise, on a un champ d’égalité 150 et 90 Hz partout. Donc l’instrument indique que le plan de descente est correct quelque soit le plan réel que suivera l’avion.
 

 

Sur l’aéroport d’Apia, l’ILS était en maintenance. Sur les Notams, ceci peut être indiqué par :
– NOT AVBL, ON TEST
– U/S
– OPR BUT CTN DUE NOT ATS MNT
– UNMONITORED STATUS

Ou d’autres phrases équivalentes. Les techniciens avaient coupé les faisceaux supérieur et inférieur. Demeurait seulement l’onde porteuse. Or, la porteuse d’un glide est faite de part égale de 90 et de 150 Hz. Résultat : dès qu’un récepteur ILS capte cette porteuse, il affiche que l’avion est sur le plan de descente. Peut importe où se trouve réellement l’avion.

Faits importants
Il est primordial de retenir certaines vérités au sujet de l’ILS
– L’identifiant Morse est émis par le LOC seulement. Donc le fait de capter un identifiant Morse correct, ne signifie pas que le glide est fonctionnel.
– Un glide incorrect n’est pas détecté par les pilotes automatiques ou le directeur de vol. Ceux-ci se comportent comme si le glide était valide.
– Dès que l’onde porteuse est reçue, le drapeau rouge disparait de l’indicateur ILS. On peut voler sur un glide invalide sans avoir de drapeau affiché au niveau des instruments.
– Le taux de descente sur un faux glide peut être tout à fait raisonnable.

 

Variomètre IVSI 767
Le variomètre indiquait un taux de descente
un peut élevé qui a été associé au vent de dos
 

 

– Un GPWS ne détecte pas l’approche du terrain dans ces circonstances parce que l’avion descend à un taux raisonnable, que le train d’atterrissage ainsi que les volets sont sortis.
– Un contrôle DME / Altitude à l’Outer Marker ne permet pas de déceler l’erreur. Il faut faire des contrôles réguliers tout le long de la trajectoire de descente.
– Le même problème existe avec le faisceau du LOC. Celui-ci peut être détecté par vérification croisée (cross check) avec un VOR situé sur le terrain.

 

ADF VOR RMI 767
Le RMI permet de détecter facilement un faux axe LOC.
 

 

FMC
Le FMC est souvent programmé pour tenir une navigation verticale et horizontale. Quand celui-ci arrive sur le point présomptif d’interception du glide, il opère un piqué forfaitaire de l’ordre de 0.5 G. Par la suite, il analyse le signal pour voir s’il y a un écart ou pas. La pente de descente est maintenue tant qu’il n’y a pas d’écart. Sur un cas où seule la porteuse est émise, le système va maintenir le premier taux de descente qui peut aboutir à plusieurs kilomètres avant la piste. S’il y a un obstacle sur le chemin (relief), c’est la catastrophe.

Performances humaines
Les pilotes font confiance aux instruments les plus précis. Par exemple, ils font plus confiance à un VOR qu’à un NDB. De la même manière, ils font plus confiance à un ILS qu’à un VOR. Donc si quelque chose semble anormal lors d’une approche, l’ILS est le dernier instrument qui sera remis en question.

Dans ce cas, seule la concentration des pilotes sur leur approche et la préparation soigneuse de celle-ci ont fait la différence.

 

ADF VOR RMI 767
Seul un croisement DME / VOR / Altitude régulier permet
d’avoir un niveau confiance acceptable dans l’approche ILS.
 

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